dimanche 24 novembre 2013

OLIVER TWIST de Roman Polanski (2005)


Oliver Twist est une coproduction franco-tchéco-britannico-italienne. Le film a été réalisé par Roman Polanski en 2005. Le chef d'oeuvre de Dickens a été très souvent adapté pour le cinéma ou la télévision, sans compter le théâtre ou les comédies musicales. Rien que pour le cinéma, il s’agit de la 5ème adaptation mais le film que nous a donné, en 2005, Roman Polanski est certainement le plus réussi de tous. Oliver Twist, comme tous les autres romans de Charles Dickens, a été publié sous forme d’un feuilleton mensuel entre 1837 et 1839, ce qui explique ses longueurs et ses rebondissements souvent rocambolesques. 

Synopsis

Oliver, dont la mère est morte de sous-nutrition, est envoyé à l’âge de neuf ans  travailler dans une fabrique d’étoupe qui est un véritable bagne pour enfants. A peine nourri, maltraité, il résiste 6 mois avant de se rebeller. Il est alors « vendu » à un fabricant de cercueils qui le fait dormir dans l'entrepôt où l'on stocke les cercueils. On imagine l'horreur que cela peut représenter, pour un enfant de cet âge, la cohabitation avec la mort.

N'en pouvant plus des brimades et des mauvais traitements qu'il subit quotidiennement, il s’enfuit à Londres. Sans le sou, mendiant sa nourriture, pieds nus, il parvient épuisé dans la capitale de l'Empire britannique où se côtoient les très riches et les très pauvres. Proie facile, il tombe entre les mains d'une bande de jeunes voleurs des rues travaillant pour Fagin, un misérable receleur. Fagin n'est certes pas recommandable mais, au moins, il ne traite pas mal ses enfants et ne les affame pas. Après avoir été accusé d’un vol qu’il n’a pas commis, Oliver est adopté par un homme aisé, M. Brownlow, qui le traite comme son propre fils jusqu'à ce qu'il soit à nouveau enlevé par la bande de voleurs qui estime qu'il leur appartient. Ils l’obligent à être complice d’un cambriolage au cours duquel Oliver est blessé. Tout se termine bien pour lui car il sera finalement adopté par la famille Maylies et M. Brownlow.

On a beau savoir qu'il s'agit-là d'un roman, on sait que Dickens a décrit la réalité d'une société qu'il connaissait bien et dont il passa sa vie à dénoncer les scandaleuses injustices. Devenu célèbre et riche, il s'engagea dans de nombreux combats, contre les violences faites aux femmes, en créant une institution humaniste destinée à accueillir les "filles perdues", contre l'esclavage, etc. Dickens décrit la terrible réalité de la vie d'un enfant pauvre (a fortiori celle d'un orphelin), dans l’Angleterre du XIXe siècle. La bourgeoisie de l’ère victorienne a bâti son insolente richesse sur le développement industriel et colonial sans se préoccuper des dégâts sociaux que cela pouvait engendrer pour les classes populaires. La Grande Bretagne n'a abrogé les « Poor laws », les "lois sur les pauvres", créées sous les Tudor au XVIe siècle, qui étaient d’une cruauté et d'une injustice terribles, classant les pauvres, qu'ils soient adultes ou enfants, comme une sous-humanité qu'il fallait traiter comme des criminels. Ces lois iniques furent en vigueur trois siècles en Angleterre avant d'être remplacées en 1834, par les New Poor Laws (officiellement Poor Law Amendment Act) qui instituait les workhouses, de véritables bagnes où les pauvres étaient censés être nourris contre du travail forcé. Les sinistres workhouses fonctionnèrent en Angleterre jusqu'au mois d'avril 1930 où ils furent officiellement abolis mais en réalité remplacés par des Institutions de l'Assistance Publique qui ne seront définitivement supprimées qu'en 1948 !   

Mon opinion sur ce film

Roman Polanski a réalisé ce film après avoir tourné son admirable Pianiste. Dans une interview, il dit qu’il voulait réaliser un film « plus léger », destiné à ses propres enfants. Ce film est loin d'être léger : nous ne nierons pas qu'il est salutaire de le montrer à des enfants de notre époque le sort d'enfants qui survécurent aux conditions d'exploitation effroyables de l'Angleterre triomphante de l'ère victorienne pour bien leur faire comprendre ce qu'est, par rapport à une société d'abondance, une société telle que celle-là. Il faut cependant y mettre les formes car certaines scènes peuvent être traumatisantes, non seulement pour des enfants, mais même pour des adultes. Certes, à côté des scènes terribles que vit le jeune Oliver, il y a aussi beaucoup de beaux moments, et le livre, comme le film, se terminent heureusement en « happy end » puisque Oliver finit par être adopté par une famille aimante. On ne peut cependant pas ne pas imaginer ce que fut le sort de ces milliers d'enfants sacrifiés pour augmenter la richesse d'une société aussi inégalitaire et inhumaine que la société victorienne. Mais, au-delà de cette époque, le film peut aussi nous amener à réfléchir sur le sort des enfants du tiers Monde qui vivent, au XXIe siècle, ce que vécurent ceux de la Grande Bretagne du XIXème siècle, certains même dans des conditions encore pires que celles d'Oliver. Rappelons aussi que, pas plus que la société victorienne, nous ne pouvons ignorer que leurs conditions misérables sont une des conséquences de la mondialisation dont nous, occidentaux, nous tirons notre abondance. 

Il n'en reste pas moins vrai que ce film est, sinon plus léger, du moins moins dur que Le pianiste, tourné en 2002. Oliver Twist est cependant une réussite sur le plan cinématographique et il démontre la maîtrise du metteur en scène dont nous avons aussi beaucoup aimé The ghost writer.

Parmi les acteurs, saluons particulièrement la prestation du jeune Barney Clark qui joue le rôle d’Oliver, dans lequel il est extrêmement juste et émouvant. Nous souhaitons qu'il puisse avoir une carrière digne de son talent.    

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